De 1970 à 1984, de la fin de ma première année à mes seize ans, je naviguerai donc entre la Côte d’opale, la baie d’Authie plus précisément et l’O….., lors de séjours thérapeutiques plus ou moins longs et puis soudain c’est la fin : Game over, silence, chut ! Séparation à la fois subie, souhaitée, brutale et solitaire. Je me retrouve seule, avec mes souvenirs, mon enfance et mon adolescence qui s’achèvera bientôt.
Désormais, rapidement, je devrai me prendre en mains, ce qui n’est pas pour me déplaire d’ailleurs, je suis prête. J’oublierai ou ferai semblant, pas le choix ! Le Bac, l’Université, le travail, gagner et vivre sa vie. Bien sûr, mon corps me ralentira, encore et toujours. Nouveaux soins, nouvelles interventions chirurgicales, loin de Berck dorénavant. Montpellier, Palavas, Namur, j’en oublie…
Un bref séjour dans les années quatre-vingt-dix, en touriste cette fois, inverse les proportions ; j’ai grandi, Berck me semble petit, je ne suis plus une enfant.
J’oublie, j’avance, j’oublie, voilà, voilà, voilà…
Insidieusement pourtant, quelque chose ne va plus. Une blessure ? Une colère froide ? A quelle date ? A la fin des années deux mille peut-être, impossible à dater. Avant, après, qu’en sais-je ?
Tel un boomerang, un cerf-volant plutôt, c’est de Berck dont il s’agit, son royaume, Berck me revient dans le crâne, je m’interroge de plus en plus souvent : « Pourquoi ? », je m’irrite parfois : « Pourquoi quoi ? », plus rarement je m’inquiète « Vais-je devenir folle ? ».
Berck, Berck, Berck, Berck…
Je ressasse, rumine, tourne en rond, en boucle, à vous de choisir, c’est vous qui lisez.
« Tiens, la mer, là-bas, on dirait Berck ! » ; « Cette odeur marine, cet air iodé, on dirait Berck ! » ; « Mes pieds qui se dégonflent, on dirait Berck ! ».
Certes, je vis depuis 2012 en Bretagne, non loin de Saint-Malo ou de Douarnenez, ce qui facilite parfois les comparaisons hâtives, mais tout de même !…
Parfois dans mes yeux, de brefs éclairs, presque magiques : « Revoir Berck et mourir… ».
Bien sûr, j’exagère, si j’ose dire, mais l’idée est là – aussi tenace que fugace.
Mon envie du jour ? Retourner à Berck ! Suivez-moi…